Friday, March 18, 2005

Perdido Street Station, de China Mieville

Tout d'abord un petit avertissement : j'ai lu ce roman en anglais, et donc, je ne sais pas dans quelle mesure ce que je vais vous dire s'applique à sa traduction française. Cependant, pour vous en donner un aperçu, voici le quatrième de couverture français (édition brochée, parue il y a quelques mois) : "Nouvelle- Crobuzon, une métropole tentaculaire, polluée, démentielle, au cœur d'un monde insensé. Humains et hybrides mécaniques y côtoient les créatures les plus exotiques à l'ombre des cheminées d'usine, des fabriques et des fonderies. Depuis plus de mille ans, le Parlement et son impitoyable milice règnent sur une population de travailleurs et d'artistes, d'espions, de magiciens, de dealers et de prostituées. Mais soudain un étranger, un homme-oiseau, arrive en ville avec une bourse pleine d'or et un rêve semble-t-il inaccessible : celui de retrouver ses ailes... Alors que la pire des abominations, des êtres qui manipulent l'inconscient, est lâchée sur Nouvelle-Crobuzon. Entre Fantasy et Science-fiction, un roman-univers qui bouscule tout sur son passage, une fresque unique déjà couronnée par le Prix Arthur C. Clarke et le British Fantasy Award"

Chapitre après chapitre, China Mieville tisse une aventure passionnante et pleine de rythme située dans un monde étrange, original et plein d'imagination. La ville immense et fantastique de New Crobuzon est pleine de créatures étranges, de gens bizarres, de machineries infernales et de magiciens originaux pratiquant l'alchimie ou la thaumaturgie avec des conséquences souvent imprévisibles.

Ce roman est très bien écrit et d'un style assez littéraire (en anglais, je ne sais ce que vaut la traduction), l'histoire est extrêmement prenante, et pleine de personnages sympas et attachants. L'auteur maîtrise bien son intrigue et maintient toujours la tension au plus haut. Mais le personnage central de ce roman est la ville elle-même, tentaculaire et fantastique. Le reste du continent, les contrées lointaines, exotiques, et les colonies sont seulement évoquées comme décours, comme toile de fond pour la ville et comme passé vaguement évoqué pour la population cosmopolite et hétérogène de cette mégapole.

Perdido Street Station est le roman le plus inattendu de ces dernière années pour moi : c'est une découverte pour moi, et c'est le livre que je suis le plus content d'avoir trouvé depuis plusieurs années (depuis la série Sandman de Neil Gaiman, probablement). C'est de la "dark fantasy" et de la fantaisie urbaine comme je l'aime. J'espère donc que la traduction rend justice à ce beau roman, quoique je déplore la tendance des traductions françaises à couper en plein de volumes ce qui, au départ, n'est qu'un seul libre (comme ils ont par exemple fait avec le Trône de Fer de GRR Martin, qui a beaucoup plus de volumes en français qu'en anglais...).

Quelques spoilers, pour ceux qui veulent en savoir plus sur ce roman :

La Nouvelle Crobuzon est une cité magique et industrielle à la fois, pleine de machines à vapeur et de grandes usines. C'est une ville tentaculaire très sombre, dirigée par un maire cynique qui s'appuie sur une milice brutale et répressive, ainsi qu'une justice qui punit aveuglément en transformant les criminels en cyborgs biomécaniques qui ont dés lors le statut d'esclaves industriels. La Nouvelle Crobuzon est une cité rongée de l'intérieur par une misère crasse et une criminalité débridée dans de nombreux quartiers. C'est un peu le Londres de Jack l'éventreur en de nombreux endroits. Mais c'est aussi une ville de science, d'arts et de culture : il y a aussi de grandes bibliothèques, un quartier de thaumaturges qui développent chacun un aspect bizarre et original de la magie, et divers "getthos ethniques" aussi bizarres que colorés. Et c'est enfin et surtout une ville perpétuellement baignée par une foule bigarrée, en perpétuelle sur-activité, comme une ruche bourdonnant à toute heure d'une vie effrénée dont la nature dépend des quartiers et des lieux.

China Miéville décrit dans le détail un environnement profondément original et fascinant, à travers des personnages très différents dont les destins s'entrecroisent et se mêlent : un thaumaturge/scientifique marginal conduisant des recherches peu académiques ; sa compagne une khepri (femme-scarabée) artiste vivant dans le milieu intellectuel de la ville ; une journaliste révolutionnaire fumeuse de cigare, clandestine et pamphlétaire qui joue sa vie dans un grand jeu du chat et de la souris avec la milice du maire ; un homme-oiseau qui a perdu ses ailes, venu d'un des endroits les plus sauvages de la planète, profondément inadapté à la vie en ville, qui est venu trouver un thaumaturge pour qu'on lui répare ses ailes arrachées. Je ne cite là que les personnages principaux, il y en a plein d'autres, toujours bien caractérisés et aux motivations crédibles.

La ville est un personnage en soi, les quartiers sont très différents, avec des ambiances et une population très typée, et ils sont décrits avec beaucoup de détails et d'anecdotes.

Les races fantastiques sont atypiques : les hommes-scarabés, les vodyanois (amphibiens qui n'ont d'autre choix que de se vautrer dans la pollution industrielle et thaumaturgique qui empoisonne le fleuve de la ville), des
hommes-cactus, des hommes-oiseaux tribaux et sauvages, etc...

La quête des personnages est atypique également : ils ne sont pas tous beaux, ils ne sont pas riches, ils ne sont pas élus par les dieux, et ils ne vont pas vraiment sauver le monde, quoiqu'ils contribuent très largement à sauver la ville de dangers bien réels, mais qui ont plus à voir avec la cupidité l'inconscience et le cynisme de certains qu'avec des menaces cosmiques...


Zénon


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Perdido Street Station, tome 1 (Français)




Perdido Street Station, tome 2 (Français)




Perdido Street Station, en un seul tome (Anglais)




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